Notre randonnée commence à Céreste en passant sur le pont de la Baou ni roman ni romain (pas même situé sur la voie domitienne), bien que ce nom figure toujours sur les cartes IGN et les cartes postales ! le panneau d’information le confirme : il date du milieu du XVIIIe siècle. Un devis est établi par Georges Vallon, ingénieur de la Province, les travaux sont confiés par acte du 4 janvier 1740 à Pierre Terras, maçon de la ville de Reillanne (A.D. des A.-H.-P. C84).
La trace du vrai pont romain a d’abord été retrouvé sur papier, aux archives en 1989 puis confirmé sur le terrain le long de la RN100, à la faveur d’une crue d’orage. La 4ème campagne de sondage, en 2001, révèle que faute de rocher solide pour asseoir le pont, les constructeurs l’ont bâti sur un socle de pierres taillées de grand appareil à joints fins liées par des agrafes scellées au plomb. Son architecture est à ce jour unique dans le monde romain. par mesure de protection, ses vestiges sont maintenant recouverts.
Après la traversée de la RN100 qui coupe le village nous nous dirigeons sur un chemin au milieu des champs puis d’une forêt de chênes blancs majestueux. Le sentier grimpe progressivement à l’ombre des grands arbres, en direction des crêtes. Une fois en haut, une magnifique vue s’ouvre devant vous : au sud, les paysages sauvages du Luberon, au nord, les grandes plaines agricoles de Reillanne et d’Apt et au loin, les Alpes. Nous continuons sur le chemin des crêtes jusqu’à Montjustin, Oppidum puis place-forte moyenâgeuse citée en 1022, Montjustin illustre la relation étroite et immémoriale qui relie géologie et occupation humaine. L’étymologie « Mons Justinus » est d’origine romaine, elle évoque peut-être l’existence d’un sanctuaire dédié à Jupiter.
> Siège dramatique en 1589 : le duc de Lavalette, à qui les habitants avaient refusé une halte dans la cité, enleva la place après un siège désespéré, massacra et pendit les habitants, détruisit l’église et le village.
Le village est édifié sur le flanc sud du synclinal qui occupe le territoire entre Céreste, Reillanne, Montjustin et Villemus. Un synclinal est un pli « en cuvette » des couches de terrain, empilées comme des assiettes creuses.
Un peu en avance sur temps de marche, nous prenons le temps pour visiter les ruelles de ce minuscule village que la modernité semble avoir oublié. Un escalier en pierre nous invite à monter en haut des remparts restaurés, surplombés par une grande tour, vestige de l’ancienne forteresse. Un endroit idéal pour profiter, encore, du paysage avoisinant. Nous découvrons l’église Notre Dame des Neiges à l’emplacement du village primitif, qui a quelque peu changé. Datant de la fin du XVIe, elle est contemporaine de la reconstruction du village qui avait été démolie en 1589 par le duc de la Valette parce que ses habitants avaient osé lui refusé le passage.
On aperçoit encore un chevet à 5 pans, une partie de la nef.
Après la visite très intéressante des lieux, nous faisons un aller-retour pour savourer notre déjeuner. Bien installés dans une salle à manger de luxe, après avoir mangé et bu avec modération nous avons repris notre chemin en faisant un détour par le cimetière éloigné du village, celui qui abrite tant de personnalités : le photographe Cartier-Bresson, Pierre Citron l’écrivain, Lucien Jacques l’artiste, et le peintre Serge Fiorio, son père était cousin de Jean Giono. La femme du photographe y est enterrée depuis août 2012. Il y a même un certain René, randonneur, ce cimetière semble abandonné. Nous ne voyons aucune croix, aucun monument de marbre. La tombe du célèbre photographe Henri Cartier-Bresson, est simplement plantée de pieds de lavandes et massif de bruyère. Un contraste saisissant avec la célébrité de l’homme.
« En fin de compte, la photo en soi ne m´intéresse absolument pas. La seule chose que je veux, c´est retenir une fraction de seconde de réalité ». Pour Cartier-Bresson, l’image naît d’un instant, sous l’œil attentif du photographe qui déclenche spontanément. Légende vivante de la photographie, il témoigne de l’histoire d’un siècle au travers d’images prises sur le vif, instinctives et parfois prémonitoires.
Nous retrouvons notre sentier qui serpente dans les bois de chênes et bientôt dans les sous-bois humides. Nous baptisons de remarquables, plusieurs arbres géants aux formes tourmentées, qui ont bien du mal à rentrer sur la photo. Bientôt nous retrouvons la route qui passe devant la Bastide Neuve, très ancienne propriété déjà recensée sous ce nom sur la carte de Cassini. Curieux mais esthétiques ces parements de pierre claire qui protègent ou décorent les arbres de la propriété. Nous contournons la propriété du Long Roux pour retrouver notre chemin du matin et rejoindre nos véhicules.
Nous étions 24 randonneurs pour participer à cette journée bien agréable, nous avons parcouru 12,6km et fait 396m de dénivelé.
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