LES CRETES DE MONTJUSTIN
Le mardi 14 février 2023
Nous partons de la Garde de Dieu vers les crêtes de Montjustin, nous sommes 16. La journée s’annonce belle comme une journée de printemps. Débutant au milieu des champs puis d’une forêt de chênes blancs majestueux. Le sentier grimpe progressivement à l’ombre des grands arbres, en direction des crêtes. Une fois en haut, une magnifique vue s’ouvre devant vous : au sud, les paysages sauvages du Luberon, au nord, les grandes plaines agricoles de Reillanne et d’Apt et au loin, les Alpes. Nous continuons jusqu’à Montjustin et prenons notre temps pour sillonner les ruelles de ce minuscule village que la modernité semble avoir oublié. Un escalier en pierre nous invite à monter en haut des remparts restaurés, surplombés par une grande tour, vestige de l’ancienne forteresse. Un endroit idéal pour profiter, encore, du paysage avoisinant. Au détour d’une rue pavée sinueuse, nous avons été séduit par le charme intemporel des maisons en pierre soigneusement préservées, et par l’imposante église Notre-Dame-des-Neiges, en cours de restauration. Ici, pas de trottoir, pas de portail, pas de clôture enfermant les jardins. Une ancienne place forte qui n’a rien à craindre, visiblement ! La crête fut occupée dès le IIIème siècle et fut une place forte dont on peut encore admirer le château. Les remparts bâtis à l’époque romane furent restaurés en 1955. Ils abritent quelques tours rondes. Le château de Luzerne était celui de l’ancienne place-forte mais on ne peut admirer aujourd’hui que ses ruines. Etant situé en hauteur, on peut découvrir, au loin, la chaine du Luberon, la vallée d’Aiguebelle, la plaine de Reillanne, la montagne de Lure et, avec une vue perçante, les Alpes du Sud. C’est dire sa situation géographique privilégiée. La majeure partie du village est constituée de maisons du XVI°s. et XVII°s., parfaitement restaurées ce qui donne un charme désuet certain.
En faisant un petit tour d’histoire, on le voit citer au Haut Moyen Age dans une charte du pape Grégoire VII, en 1073, confirmant les possessions de l’abbaye de St. Victor de Marseille. On avait déjà mentionné ce village en 1022 comme étant une place forte de la Haute Provence. Deuxième point d’histoire : son blason. Sans employer des termes d’héraldisme auxquels seuls quelques rares initiés pourraient avoir accès, on voit un éléphant, couleur jaune sur un fond vert qui rappellerait le passage d’Hannibal par le village en allant envahir l’Italie. Troisième et dernier point d’histoire : durant les guerres de religion, en 1589, le duc de La Valette à la tête de son armée passa près du bourg et voulut s’y arrêter pour bivouaquer, les habitants lui fermèrent les portes. Alors le duc mit le siège et très vite s’empara de Montjustin, il passa tout le monde au fil de l’épée et le rasa. Il est à noter que 25 hommes de Dauphin s’étaient joints aux troupes royales du duc.
Tout au long de son histoire, Montjustin fut une place forte, déjà au temps des Gaulois non romanisés, c’est-à-dire avant la conquête de J. César, un « oppidum » existait dont les archéologues ont retrouvé des traces. Aujourd’hui, on voit encore les ruines de ses remparts qui datent de l’époque romane renforcé par des tours rondes. Entre le XI° et le XII° siècle, cinq églises sont citées car au Moyen Age comme à la Renaissance, le village était beaucoup plus peuplé qu’à notre époque où l’on dénombre environ 55 habitants (216 habitants en 1766, par exemple).
Déjà, en 1053, on trouve traces de trois lieux du culte. Celle que l’on peut voir aujourd’hui date de la fin du XVI° siècle (Notre Dame des Neiges). Elle vit le jour après le passage du duc de La Valette et il faudra attendre le début du XVII° siècle pour que le bourg se relève complètement des saccages et des massacres qu’il avait ordonnés. A travers ses ruines, on devine les restes d’un chevet à cinq pans, d’une nef à deux travées et d’une voûte sur croisée d’ogive.
Après avoir été un village agricole comme tant d’autres en Haute Provence, il est devenu un lieu d’habitation pour artistes. Un passé récent (1947) a vu s’installer le peintre Serge Fioro dont le père était un cousin de Jean Giono comme, donc, lui aussi. D’autres personnalités de l’art et de la poésie y ont vécu et y reposent dans son cimetière : Lucien Jacques, peintre, graveur, poète, grand ami de Jean Giono avec qui il animera les rencontres du Contadour ; Pierre Citron, musicologue, biographe de ce même Jean Giono ; Lucienne Desnoues, poétesse qui s’y installera définitivement au décès de son mari ; Henri Cartier-Bresson, photographe bien connu qui y terminera sa vie, il y est, d’ailleurs, enterré. De nos jours, ce village ne veut pas disparaitre, dans la lignée de son passé artistique, ses habitants ont fondé une association culturelle et artistique. Il y a, même, un café-restaurant à vocation culturelle (l’Ecole Buissonnière). Ancienne école où nous avons été accueillis très chaleureusement pour prendre notre repas après maintes gâteries, nous avons du repartir en direction de Cereste par un sentier à travers bois nous ramenant vers la plaine de l’Encrême.
Après la traversée de la nationale nous avons repris un chemin remontant sur Reillanne et emprunté l’ancienne voie ferrée venant de Cavaillon. Après Céreste, la ligne quitte le Vaucluse pour entrer dans le département des Alpes de Haute-Provence au franchissement du Calavon. Le point culminant de la ligne se trouve au col de des Granons (490 m.) un peu avant Reillanne. Elle suit ensuite la vallée du Largue qui se jette dans la Durance.
Nous découvrons au fond d’un petit parc planté de marronniers et platanes, le château de Valligrane sur la commune de Reillanne, construit entre 1650 et 1680, il tranche avec les fermes alentour. Il appartenait à une vieille famille du lieu, les d’Izarny. Le comte d’Izarny-Gargas est décédé en 2015, François d’Izarny-Gargas était en 2011 président de l’association de sauvegarde et d’animation du prieuré de Carluc, Louis auteur d’un Nouveau nobiliaire de France.
Nous continuons notre chemin et là au pied de Reillanne, s’abrite le joli château de Pinet, nous lui tournons le dos pour terminer notre rando et retrouver nos voitures. Nous avons marché 13kms 5 et avons eu 350m de dénivelé.
Superbe marche très variée entre paysages divers et lieux chargés d’histoire, merci Caty.
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