LE CONTADOUR – Entre bergeries et lavandes

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 LE CONTADOUR – Entre bergeries et lavandes

le mardi 8 octobre 2019

La commune de Redortiers doit son nom à un ancien village aujourd’hui en ruine, mais dont la vie s’est déplacée vers le hameau du Contadour, cinq kilomètres plus au Nord. Elle tire son nom de ce que, dit-on, les bergers d’Arles arrivés en ce lieu, y comptaient leur brebis : de là le mot Contadour, qui signifie lieu où l’on compte. Cette région est typique pour ses constructions faites en pierres sèches, non scellées. Après avoir dépassé le Contadour, on atteint l’église Saint-Jean-Baptiste campée à gauche au bord de la route, accolé à son cimetière, l’édifice daterait de 1726. Nous partirons donc de cet édifice, au nombre de 33 à la conquête  des grands espaces, de la solitude et du silence.

Le but est le chemin, chemins qui ne mènent nulle part, entre deux prés, que l’on dirait avec Art de leur but détourné. Chemins qui souvent n’ont, devant eux, rien d’autres en face que pur espace et la saison. Rainer Maria RILKE (1924).

le Contadour mérite le déplacement pour ses paysages vallonnés marqués par la pratique ancestrale de l’élevage ovin. Sur cette commune, les fermes et les bergeries faites avec la technique des pierres sèches se remarquent par leur charme rustique : jas des Terres du Roux, bergerie des Fraches, jas des Agneaux.

Nous passons devant la Ferme de La Tinette, ancienne ferme auberge où les produits dégustés étaient déjà des plus naturels. Poursuivant plein Nord à travers bois nous arrivons devant une bergerie, la plus belle, remise en état par l’APARE avec un grand merci à ceux qui l’ont restaurée. C’est le Jas des Terres du Roux, entièrement réalisé en assemblage de pierres sèches, datant des XVIII-XIXème siècle. L’intérieur de la bergerie est exceptionnel. Nous quitterons ce lieu plein d’histoire, par le sentier montant, puis par une piste dépassant le haut des Terres du Roux, nous découvrons une bergerie en ruines sur la gauche, nous rejoignons la piste qui conduit à la 1ère Bergerie Tunnel des Fraches. Là aussi, un autre type de construction de la Montagne de Lure. Au milieu d’une prairie, 2 ensembles de pierres sèches, la bergerie, et la citerne. La bergerie de 20 m x 3,40 m, est construite selon le principe de la voûte en berceau, dite tunnel. Le soubassement sur 1,50 m est réalisé par empilement de pierres sèches, puis des corbeaux sont mis en place pour soutenir l’installation d’un coffrage en bois, qui sera déplacé au fur et à mesure de l’avancement de la voûte du tunnel. Du fait de leur conception, ces bergeries, sont plus longues, mais moins larges que celles en coupole. Poursuivant vers le Nord nous tombons sur la 2ème Bergerie des Fraches, mais celle-ci, en arc, est différente encore des 2 précédentes. 4 arcs de pierres jointées au mortier, partent du sol, et sont inclus dans l’épaisseur des murs. La toiture disparue, à 2 pans, avec une panne faîtière dont il reste quelques poutres, était recouverte de tuiles canal, remplaçant les lauzes plus lourdes originelles. Une pièce et une cabane de berger se trouvaient à l’entrée de la bergerie et se sont complètement effondrées. Continuons notre chemin pour passer devant les ruines du Jas des Agneaux. Il est dommage que ce site plein d’histoire, ait été laissé à l’abandon, ce fut le lieu de tournage du film Crésus, de Jean Giono, avec Costa Gavras comme assistant et Fernandel principal acteur, était la demeure de Fine dans ce film. Cet ensemble composé de plusieurs bâtisses accolées, recouverts de toitures de tuiles à une ou 2 pentes furent rajoutées au fur et à mesure des besoins. Nous rejoignons le sommet de Larran en quelques mn, à travers les pâturages, matérialisé par des cairns sur la ligne de crête de la Faye. Le panorama est exceptionnel. Au Nord-est, la forêt, puis la Drôme provençale, les Préalpes, le Vercors, les Ecrins et le Mercantour, à l’Ouest le Mont Ventoux, et au Sud, des pâturages et forêts, les Monts de Vaucluse, le Luberon, la Ste Victoire et la Sainte Baume, une vue sur 360° inoubliable à vous couper le souffle..  Nous poursuivons sur la ligne de Crête de la Faye en direction d’un grand cairn, celui du Pape à 1431 m. Nous apercevrons, le sommet avec l’émetteur de la Montagne de Lure, dans la trouée. Un éclairage exceptionnel au sommet. Après une pause tranquille et un bon déjeuner, nous reprenons notre chemin et resterons sur les hauteurs pour rejoindre sur le plateau le Jas de Bouscarle, à la lisière d’une prairie. Il est composé d’une bergerie à 5 coupoles encorbellées, montées sur arcs, comme celui des Terres du Roux. Placé au-dessus de la combe, il permettait de surveiller le troupeau, à l’abri du vent, et au soleil. A gauche de l’entrée, de la bergerie, une cabane accolée bien équipée avec table, chaise, cheminée, est recouverte d’une toiture en tuiles canal; sur son linteau, 1904, date probable de sa réalisation. Au-dessus un muret d’enclos et de soutènement, et à gauche une citerne comme un puits, enterrée et creusée dans le rocher, permettait de stocker les eaux de pluie récupérée par un chaînage de la toiture de la bergerie. Après une descente dans le ravin-vallon de Fond-Brune nous arrivons à l’église où nos voitures nous attendent.

Merci Jacqueline et Germain  pour cette randonnée de 17 kms et de 350 m de dénivelé. Merci de nous avoir fait parcourir des chemins qui partent vers de vrais infinis, de nous avoir fait respirer un air d’une pureté sans égale.

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REDORTIERS-LE CONTADOUR

le nom vient de l’occitan : « Redorta » avec comme traduction : « bosquet de petits arbustes, ronciers, saules, osier ». Il apparait pour la première fois, dans les textes, en 1162 et a la forme latine de « Redortierus ». Il fut certainement édifié par un seigneur de Simiane, au XII°s . De cette période moyenâgeuse, il reste un donjon roman (XII°s.)  qui surgit au milieu des ruines et on sait que le village avait un prieuré, Ste Marie, qui dépendait de l’abbaye de Carluc. Au temps de la reine Jeanne, Redortiers qui dépendait de la viguerie de Forcalquier, fut détaché ainsi que Revest du Bion, son voisin, pour être joint au Dauphiné. D’ailleurs, en 1950, on retrouva au sein d’un arbre, une marque en forme de croix qui délimitait la frontière entre cette région et la Provence. D’après ce que dit l’abbé Féraud, le village se divisait en deux paroisses, celle de la bourgade était consacrée à St. Michel ; Le Contadour avait sa propre église, construite en 1726 et dédiée à St. Jean Baptiste.

 Le bourg, longtemps laissé à l’abandon, est en pleine restauration (débroussaillage, murs relevés etc.) sous la direction d’une association régionale, l’APAIRE (association pour la participation et l’action régionale). 

 De nos jours, le village s’est déplacé et a changé de nom, celui qui continue de vivre est formé d’un de ses anciens hameaux, il s’appelle dorénavant : « Redortiers Le Contadour » car Le Contadour est anciennement un hameau de Redortiers. A ce jour, il compte 68 habitants mais un chiffre qui évalue une population est en perpétuel mouvement, que sera-t-il dans le futur ? En 1836, il y en avait  517, sous Louis XIV, on en dénombrait 500. Comme de nombreux lieux de Haute Provence, celui-ci ou plutôt le hameau du « Contadour » est connu grâce à Jean Giono car un de ses romans : « Regain » fut porté à l’écran par Marcel Pagnol avec entre autres Fernandel comme acteur. Pagnol demanda à Giono si Aubignane, nom du village où se situe l’action du roman, existait vraiment, Giono lui répondit que c’était Redortiers. Du coup, Pagnol voulut tourner le film dans un décor naturel  mais devant les difficultés rencontrées par l’équipe technique, tout cela dû à une végétation luxuriante, pour y accéder, il préféra le reconstruire dans des terres, près d’Aubagne, qu’il avait achetées pour en faire un studio externe. Il laissa à Giono trois techniciens pour tourner un court métrage sur le village, ce dernier ne fut jamais projeté. Le Contadour devait encore obséder l’écrivain puisqu’il y tourna un film avec Fernandel qui n’eut pas un grand succès : « Crésus ».

De 1935 à 1939, J. Giono réunit des amis, avec eux, il fit des excursions qui leur faisaient connaitre le pays. Bien vite, elles se transformèrent en réunions intellectuelles (poésie, littérature, peinture etc.) orientée vers le pacifisme. Pour ce, il acheta au Contadour une maison qui se nommait « Le Moulin » qui fut un véritable moulin. Lorsque les amis de J. Giono qui y venaient devinrent trop nombreux, ils émigrèrent tous à la ferme des « Graves ».

9 Responses

  1. JEAN

    Bonjour,

    Depuis janvier 2020 l’accés aux bergeries est interdit y compris pietons !!! le grp en cours de détournement (y compris sur les cretes entre pas du redortier et col de la roche) nous sommes un groupe de randonneurs amoureux de cette région (certains y viennent depuis plus de 40 ans) nous continuons à emprunter les chemins nous avons eu « un rappel à l’ordre » par le propriétaire du gite Le Trait pourriez vous nous renseigner à ce sujet (est il possible d’interdire la fréquentation pédestre de ces chemins) d’autant plus que Les terre du Jas de Roux ont été restaurés par Apare à priori organisme public.
    Cordialement.

  2. Viguier ALAIN

    Bonjour , priver les gens de profiter d’un patrimoine historique et culturel sur l’autel de la « propriété  » est proprement scandaleux , et ce qui l’est encore plus , c’est qu’ils en est le « droit »
    La seule terre dont l’être humain est propriétaire est petit mètre carré sur lequel il est posé à chaque instant de sa vie , et la seule qu’il possédera seront les quelques pelletees qui serviront à inhumée sa dépouille .
    C’est pathétique !!!
    Cordialement .

  3. CASSET

    bonjour,
    je comprends votre désarroi de ne plus emprunter certains sentiers sur ce plateau magnifique – le sentier concerné a été débalisé et est en cours d’un nouveau tracé qui éviterait de passer sur les terres du propriétaire du Jas des Roux et de Tinette
    Ce monsieur défend sa propriété, il y avait une convention de passage qu’il a dénoncée suite à des incivilités que nous ne pouvons que déplorer
    Nous, vous, sommes victimes d’un comportement inadmissible de certains randonneurs qui ne respectent rien et en plus se mettent en danger augmentant la responsabilité des propriétaires – c’est comme dans tous les domaines, il y a des bons et des mauvais randonneurs
    De toute façon ce plateau sera toujours accessible mais en évitant certains passages qui sont en cours d’étude et nous nous devrons de les respecter

  4. Jack FREROTTE

    Je ne pense pas qu’ils ont le droit d’interdire l’accès, c’est pas possible …
    Peut être poser la question à la mairie, ou un berger est trop dérangé.

  5. sensevy

    Nous sommes aussi choqués que Jean par la décision de fermer les sentiers si chers à Giono et qui font partie de notre patrimoine culturel . Etre propriétaire ne donne pas tous les droits;
    Existe t il une association de préservation du Contadour ?

  6. Anne Valet gadet

    Nous venons de faire cette triste expérience : ordre de quitter les lieux car propriété privée.. nous sommes venus d ‘Avignon et avons rencontré un autre couple qui lui venait de Marseille !
    Comble d ‘ironie ce monsieur nous conseille une balade vers les ruines du vieux village remis en état aussi par l ‘Apare ..
    Il faudrait être nombreux pour que ce genre de décision ne soit plus possible…
    Certes les bergeries méritent des protections mais des solutions peuvent être trouvées. A ce propos on constate que les proprio ont laissé se détériorer ces beaux bâtiments et que l ‘ argent public les a en partie sauvés.
    Quand tout sera privé
    On sera privé de tout
    Et les générations futures ne pourront plus respirer dans ce monde super hostile…..
    Alors pourquoi ne pas se mobiliser?? Anne Valet.

  7. MICHELE MARTIN

    bon, moi je pense que le lobby des chasseurs y est un peu pour quelque chose. C’est bien connu les randonneurs font fuir le gibier non ?

  8. DERONZIER

    Je suis originaire de cette région. J’ai marché deux fois quelquefois trois, par an, sur le sentier des bergeries. Paysage grandiose où l’atmosphère provoque des émotions intenses. J’ai mangé plusieurs fois à l’auberge de Tinette. Hélas, j’ai vu aussi des colonnes de véhicules 4X4 descendre de la montagne (malgré une pétition à l’auberge de Tinette). J’ai vu également des ânes, qui ont été « tagués », et oui … Alors, chasseurs ou propriétaires excédés, nous le font payer cher.
    Il n’y a pas de terrains publics, ce sont des propriétés privés, le passage était consenti.
    J’en suis d’autant plus triste que je souhaitais y retourner ce printemps. J’en garderai toujours un souvenir ébloui et mélancolique.

  9. Yolande Rouvier

    Bonjour, Oui je suis moi même choquée et scandalisée par ces panneaux « menaçants » posés au départ des deux chemins vers Les Tinettes et le plateau. Le grand fayard, les bergeries pour certaines laissées en ruines, le Jas des Terre du Roux classé Monument historique en 1993, la vue sur la vallée du Jabron, et j’en passe….tout ceci désormais interdit au public et réservé à ???.
    Comment laisser faire ? Ceux qui s’étaient appropriés les rivages et côtes méditerranéennes n’ont-ils pas dû rendre au public ces biens nationaux ? Qu’en est-il de la soi-disant étude d’un nouveau sentier soi-disant à l’étude depuis tant d’années ?
    J’ai des photos de ces bergeries datant des années 1986 maintenant à l’abandon ; comment laisser ce patrimoine national se détruire par le temps ? Je vais mourir sans revoir ces lieux magiques….
    Agissez s’il vous plait pour rendre aux vrais randonneurs amoureux ces paysages. Interdisez l’accès aux 4×4 bien évidemment !

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